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Soleil, Vin et Shang Han Lun.
Étant un enfant, nous avions l’habitude de partir certains dimanches dans une pinède sur la plage de Los Arenales, à Alicante, ma ville natale, pour passer une belle journée entre baignades, rires et siesta entre amis.
Lors d’une de ces sorties mon père s’approcha avec une bouteille de rosé et il me dit: “enfuis la dans le sable”. A ce moment-là je ne compris pourquoi, mais, comme n’importe quel enfant, cette idée m’enchanta. C’était le mois de juillet et les températures atteignaient facilement les 40°. Nous étions à l’ombre des pins, qui nous offraient un peu de sa généreuse fraîcheur pendant cette torride journée.
Je laissai la bouteille près de moi et commençai à creuser. Au début cela ne demandait pas beaucoup d’effort mais le sable sec de la surface ne cessait de couler encore et encore pour remplir le trou à peine profond. Armé de patience j’avais réussi à atteindre un sable plus ferme, humide et frais. Le travail nécessaire pour creuser se fut de plus en plus dur mais le résultat ne se fit pas attendre. D’un coup, j’ai compris pourquoi mon père m’avait demandé d’enterrer cette bouteille. Le sable humide et frais serait idéal pour rafraîchir cette bouteille à la liqueur pâle. Une fois le trou suffisamment élargi, j’ai pu l’enterrer sous le sable à presque la faire disparaître. Il ne restait plus qu’à attendre…
C’est il y a quelques jours, pendant que je finissais la lecture de Chinese Classical Medicine de Liu LiHong que ce souvenir vint à ma mémoire, comme un flash. L’image se présenta à moi: été et hiver, jour et nuit, extérieur et intérieur, Tài Yáng et Tài Yīn…
Tandis qu’en haut la chaleur suffocante régnait, l’intérieur de la terre était frais et humide. Été en haut, hiver en bas. Lorsque le yáng qì se trouve en haut, en dehors, celui-ci ne peut pas se trouver en même temps à l’intérieur de la terre. Jour et nuit suivent la même règle, ainsi que nôtre corps, entre Ciel et Terre, ne peut sinon se faire écho des forces qui le traversent et l’animent: le jour le yáng qì se trouve à l’extérieur pour réchauffer la peau, les muscles, les tendons; la nuit le yáng qì pénètre pour réchauffer le centre, les organes, les entrailles…
Tài Yáng y Tài Yīn ne sont pas des simples constructions intellectuelles pour classer ou localiser des maladies. Ils sont les témoins, les pôles du temps qui s’écoule sans pause, qui rythment (avec Shǎo Yáng, Yáng Míng, Shǎo Yīn et Jué Yīn) les saisons, les jours qui passent, les cycles lunaires et enfin, la mélodie du yáng qì.
En écrivant ces lignes une autre image apparaît dans mon esprit…
A Rojales, le village où j’ai passé une bonne partie de mon enfance, la famille de mon père vivait dans une grotte (Eh oui, une grotte !). Une confortable grotte taillée dans le grès qui dessinait autour le paysage de collines. Une grotte dans laquelle il faisait frais en été et tempéré en hiver. Ici, à nouveau, à l’intérieur de la terre nous pouvons sentir comment durant l’été, lorsque Tài Yáng gouverne pendant trois mois, le yáng qì se trouve à l’extérieur, alors que l’intérieur (de la terre) se trouve déficient. Par opposition, durant l’hiver, Tài Yīn gouverne pendant trois mois et le yáng qì se trouve à l’intérieur, l’extérieur est froid et déficient.
Le Su Wen 2 nous dit: “[…] les Sages au printemps et en été cultivent le yáng, à l’automne et en hiver cultivent le yīn […]”. Nous connaissons tous l’idée de consommer des aliments de nature fraîche ou froide pendant les périodes de chaleur et consommer des aliments de nature tiède ou chaude pendant les périodes plus froides et ainsi équilibrer le qì de chaque saison.
Mais finalement, cette façon “logique” d’agir n’est pas la plus favorable pour notre corps. Je vais laisser Wang Bing, le grand commentateur du Nèi Jīng, être plus précis: « au printemps [los Sages]haïssent [la nourriture de nature] fraîche, en été [los Sages] haïssent [la nourriture de nature] froide, pour nourrir [lors de la période] yang. A l’automne [los Sages] haïssent [la nourriture de nature] tiède, en hiver [los Sages] haïssent [la nourriture de nature] chaude, pour nourrir [lors de la période] yīn. »
Les conseils de Wang Bing tiennent compte de la place, principalement, qu’occupe le yáng qì pendant l’année. Mais nous allons nous concentrer sur Tài Yáng y Tài Yīn pour que ce soit plus clair. L’été (ou le matin) le yáng qì de l’homme se trouve à l’extérieur, raison pour laquelle l’intérieur se retrouve en déficience. Pour cela Wang Bing ne recommande pas de consommer des aliments de nature froide en été, pour soutenir au yàng qì déficient à l’interne. Nous connaissons tous ces fréquentes diarrhées estivales dues à une ingestion excessive de boissons voire d’aliments de nature fraîche ou froide (diarrhées par déficience de yáng). D’un autre côté, l’hiver (ou le soir/nuit) le yáng qì de l’homme se situe à l’intérieur, raison pour laquelle l’extérieur s’en trouve déficient (c’est pour cela que nous allons nous couvrir, pour compenser cette déficience). Wang Bing conseille, alors, de ne pas consommer des aliments de nature chaude en hiver, afin de soutenir et nourrir le yīn qì et éviter que le yáng qì déjà présent à l’intérieur ne soit trop puissant et blesse le yīn qì.
L’être humain est le résultat des échanges des énergies entre le Ciel et la Terre. Son fonctionnement est le reflet de la nature et de ses cycles. Connaître ces cycles nous permet d’adapter notre alimentation et notre comportement. Ainsi, la vie qui réside en nous peut s’exprimer dans tout son potentiel et cela pendant des longues années.